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Lionel Zinsou «Selon moi, le G20 est une miraculeuse surprise»

Economie - 6 mai 2009 - Auteur : Easybourse

Lionel Zinsou

Membre du comité éxécutif de PAI-Partners et conseiller auprès du Président du Bénin

Le 9 Avril dernier, le Master 222 Gestion d’Actifs de l’Université Paris Dauphine organisait sa conférence annuelle sur le thème Ont-ils tué le capitalisme?.  Cette manifestation, qui a réunis près de 650 personnes dont de nombreux professionnels de la gestion d’actifs, des journalistes et des étudiants, était axée sur les opinions d’un panel d’experts parmi lesquel Claude Bébéar, fondateur du groupe Axa et président de l’institut Montaigne, Patrick Artus, directeur des études économiques du groupe Natixis, Jean-Paul Betbèze, chef économiste et directeur des études économiques du groupe Crédit Agricole, et Lionel Zinsou, membre du comité éxécutif de PAI-Partners et conseiller auprès du Président du Bénin.

Ci-dessous, le verbatim de l’intervention de Lionel Zinsou.

Quel regard avez-vous porté sur le sommet du G20 qui s’est tenu le 2 avril dernier ?
Selon moi, ce G20 est une miraculeuse surprise. Ne serait-ce que parce qu’il a supposé un important travail de coordination internationale. Même si l’arrivée en scène de Barack Obama a quelque peu gâché la fête de Nicolas Sarkozy, ce dernier a tout de même réussi à convaincre les dirigeants des 20 grands pays réunis de travailler entre les deux sessions.

Ainsi, pour la première fois, quatre groupes de travail ont été créés et co-animés par un pays émergent et un pays développé. La France et l’Indonésie se sont penchées sur la question de l’augmentation des ressources de la Banque mondiale et des banques locales de développement (banque africaine, banque interaméricaine, banque asiatique). Les règles contre les paradis fiscaux, dite d’intégrité du marché ont été préparées par un groupe de travail coprésidé par l’Allemagne et le Mexique.

L’Afrique dont tout le monde disait qu’elle était la grande absente de ce sommet, n’était pas si effacée que cela puisque l’Afrique du Sud et l’Australie ont réfléchis ensemble sur toute une série de mesures concernant le fonctionnement et la transparence des marchés.

Au-delà de cette considération purement technique, des moyens de 750 milliards de dollars ont été donnés au Fonds monétaire international. Ceci est loin d’être négligeable car une telle décision a eu pour effet de lever un doute encore plus grave que de savoir si General Motor serait placé sous le chapter 11, ou de voir se concrétiser la faillite de Lehman Brothers, et qui concerne la faillite d’Etat. Suite à la crise majeure des paiements du Kazakhstan et à la défaillance complète de la Hongrie et de la Bulgarie, on a commencé à anticiper le fait que les prochains pays seraient la Grèce, l’Italie et l’Espagne. Le risque de faillite d’un État souverain est de ce fait différé dans le temps d’au moins  quelques années.

Le travail du G20 qui reprend beaucoup de recommandations posées à l’époque par l’institut Montaigne est l’amorce d’un processus immense de réglementation qu’il est nécessaire de suivre?
Ce n’est pas parce que l’on souhaite plus de réglementation, que l’on est contre l’économie de marché? Nous avons, notamment sur le marché du crédit, des mécanismes techniquement très dangereux qui peuvent être mis en ?uvre. L’émission de monnaie ne connait pas beaucoup de limites spontanées. Des rationnements quantitatifs et qualitatifs sont nécessaires dans l’industrie de la finance.

J’ai vécu quelques années professionnelles dans l’industrie alimentaire. Or les normes que l’on impose dans cette industrie sont bien plus sévères s’agissant de l’étiquetage des produits, de la transparence, que celles que l’on applique aux produits financiers. Nous avons concernant la sécurité et la stabilité financière le dixième des normes techniques que nous aurions dans le bâtiment ou que nous aurions pour fabriquer un yaourt.

Il y a lieu de féliciter la décision du G20 eu égard à la question des paradis fiscaux qui a eu beaucoup de succès. Il a en effet été demandé aux hedge funds dont la moitié est basée dans les paradis fiscaux de s’enregistrer auprès des autorités monétaires des pays où ils commercialisent les parts et où ils lèvent les fonds
Cela met des acteurs qui représentent de 30 à 50% des transactions sur les plus grandes places financières, à l’intérieur d’un système réglementé. Ce n’est pas anecdotique, mais fondamental, si on veut que les fonds d’arbitrage qui par ailleurs sont indispensables aux marchés soient soumis à des règles du jeu.

Certains marchés méritent d’être développés et agrandis?
A mon sens la crise financière a commencé au premier semestre 2007 avec les émeutes de la faim. Le prix de subsistance (blé, riz, lait) avait alors augmenté dans les pays en développement à un niveau insupportable.

Aujourd’hui, 5% du volume mondial du riz et 10% du lait s’échangent sur les marchés. Tout le reste est captif dans la consommation intérieure. Cela peut appauvrir en quelques semaines des centaines de milliers de personnes. Cela sous-entend des problématiques phares de malnutrition et de sous nutrition.
Tout le travail du cycle de Doha au sein de l’OMC est lié de manière indirecte à la crise financière.

La montée des risques ces dernières années a été masquée par une période de croissance sans précédent?
Au début des années 2000, l’Espagne était considérée comme un modèle. Le pays faisait des excédents dans l’exécution de sa loi de finance, avait éradiqué son taux de chômage et présentait un différentiel de croissance significatif. On construisait parallèlement une bulle immobilière, une bulle de crédits, une bulle d’endettement des ménages. L’Espagne a fini par avoir 10% du PIB en déficit traduisant des déséquilibres très profonds.

De même la Grande Bretagne était-elle mise en avant comme exemple pour l’Eurozone car elle était en différentiel permanent de croissance et de plein emploi.
Les Etats-Unis se vantaient d’une période de croissance qui n’avait pas d’équivalent de par son ampleur, d’un niveau de plein emploi et d’une utilisation des facteurs de production jamais atteints jusqu’alors.

Nous avons connu dans le monde émergent, l’équivalent des crédits subprimes?
Effectivement, des Etats souverains étaient très subprimes en termes de capacité de remboursement et trouvaient cependant parfaitement à se financer. Nous étions dans une période d’ivresse telle, que l’on se disait qu’il n’y avait plus rien qui ne soit pas finançable : un port en eau profonde à Dakar, un réseau d’assainissement au Bengladesh.

Ces années de surchauffe ont permis à des centaines de millions de gens de passer de l’autre côté du seuil de pauvreté. Cela se mesure de façon précise en Asie du Sud, en Afrique…

Il est critiqué le fait que le G20 recommande comme solution à la crise d’une part le développement de la création monétaire et d’autre part le transfert d’actifs risqués dans le bilan des banques centrales. Qu’en pensez-vous?
La création monétaire n’est pas en soi quelque chose qu’il faut diaboliser. La création du crédit non plus. Rien ne sert de comparer l’évolution d’un passif en valeur à l’évolution du produit national brut en volume. La question se pose de savoir si en face du passif que nous allons créer, nous aurons une valeur d’actifs qui progresse.

Or des actifs sont en train de se développer considérablement en moyenne période. Quand on est sur le continent africain ou lorsque l’on est en Chine, toutes les catégories d’actifs sont en train de s’activer sous vos yeux. Les terres arables, le foncier coûtent de plus en plus cher. La dynamique de croissance économique de croissance démographique fonctionne.

Le fait que la bourse de Johannesburg ait eu une capitalisation boursière en 2007 qui représentait tout le produit national brut de l’Afrique ne traduit pas la formation d’une bulle mais est le signe que l’économie de l’Afrique du Sud est en train de devenir une grande économie émergente.

Dans ces conditions, il ne faut pas tout dramatiser. Oui il va y avoir un développement du passif, oui on va utiliser de manière massive le crédit, la Chine est en train d’en donner la preuve flagrante, oui la production du crédit en France sera significativement supérieure à celle de 2008, même si nous ne mettons pas en prison les patrons des établissements bancaires qui ne suivraient pas les directives que l’Etat leur donnerait. Mais il y a de véritables actifs qui se construisent.

Les actifs que nous transférons aux banques centrales sont des actifs temporairement toxiques, en ce sens que si nous revenons dans un contexte qui reflète celui du moment où on a émis ces crédits, on aura retrouvé une liquidité de ces actifs tout à fait saine. Ce ne sont pas des actifs toxiques par nature, comme le seraient des déchets chimiques ou nucléaires. Ces actifs sont toxiques à un certain niveau de conjoncture.

De quelle manière percevez-vous les contrecoups de la crise financière sur le monde émergent ?
Un continent comme l’Afrique avait 5% de croissance du PIB en 2007. Jusqu’en septembre dernier le FMI avait pensé que le continent connaitrait pour 2009 environ 9% de croissance. La crise a entrainé une division par trois de cette prévision. 50 milliards de pertes dans les crédits subprimes au Nevada et en Californie nous ont alors conduit à tabler sur une croissance par tête de 0.

Comment appréhendez-vous l’évolution de la croissance dans les années à venir ? Quelque chose que nous n’avions pas prévue réside dans le fait que non seulement nous allons devoir faire face à une augmentation de la population dans le monde (trois milliards d’habitants supplémentaires), mais qu’en plus cette population aura vocation à avoir plus de revenus.
La véritable nouveauté sera donc le fait que de plus en plus de pauvres seront solvables. Dès lors si la population mondiale a vocation à croitre de 30% en 30 ans, la demande alimentaire devrait augmenter de 150%.

Cela va à la fois imposer de la croissance verte mais cela va également avoir des effets d’aggravation de certains déséquilibres écologiques.  L’innovation sera par conséquent non seulement importante pour stimuler la croissance mais également pour remédier aux répercussions perverses de cette croissance.
Les banques ont encore de beaux jours devant elles en termes de distribution de crédits et de création monétaire.

Propos recueillis par Imen Hazgui

Article proposé par:

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